« Aaaah ! »

Ce matin, Eliott avait ouvert les paupières en sursaut. La raison ? Pour le moins surprenante, était l’heure. Oui, l’heure. Son réveil affichait cinq heures et demi tapantes. Heure à laquelle le professeur ne se réveille, pour ainsi dire jamais. Seulement aujourd’hui, il était contraint de renoncer à de douces heures, niché dans les bras de Morphée pour retrouver son meilleur ami, dans le Parc de l’école. Son meilleur ami n’était autre que Jaeden, avec qui il partageait tout, depuis leur première année à Poudlard. Ils se retrouvaient sur beaucoup de points, et s’entendaient à merveille ; ils faisaient autant de conneries que des gosses de cinq ans. Tout semblait dérisoire lorsqu’ils étaient ensemble, comme ces matins, où ils se retrouvaient sur le terrain, pour se défouler un peu. La seule chose qui contrait l’enthousiasme d’Eliott, c’était vraiment, vraiment l’heure. La preuve en est ; il s’était levé en retard, malgré l’ardente sonnerie de son réveil. Ce fut un petit félin, doté d'un pelage bleu-gris, qui répond au nom de Patrouille qui eut raison de son sommeil. Ce Chartreux n’était autre que son animal de compagnie, qui avait la bonne idée de grimper sur lui pour lui lécher la joue. Qu’une si petite langue puisse râper à ce point-là l’avait toujours surpris. Cela était étonnant, mais utile finalement.
Les yeux mi-clos, les cheveux ébouriffés, Eliott se leva en trombe. Il fit virevolter les draps de son lit, enleva son caleçon qu’il portait en guise de pyjama, et courut dans la salle de bain. Il prit une douche .. glaciale. Ce n’était visiblement pas son jour. Frigorifié, il se dépêcha de se préparer et de dévaler les escaliers.
Il jetait un œil à sa montre toutes les deux minutes, en espérant secrètement que le temps puisse se figer l’espace d’un instant, ou il allait vraiment être retard. Malheureusement, la chance n’était pas avec lui, et les secondes passaient si vite qu’elles semblaient se dérouler sous ses pieds. Il attrapa sa baguette magique, qu’il mit dans sa poche arrière (il ne s’en séparait jamais), et d’un geste innocemment violent, ferma la porte de sa chambre. Il arriva en toute hâte dans la Grande Salle, but une gorgée de café, emporta une pomme et sortit de l’école. De toute évidence, Jaeden était déjà là-bas. Il fallait qu’Eliott aille le plus rapidement possible, la dernière chose dont il avait envie, c’était de se faire remonter les bretelles par son pote.
Sur le chemin, le jeune homme croqua sa pomme, pour ne pas perdre encore plus de temps. Les premières lueurs apparaissaient dans le ciel, le soleil n’allait pas tarder à pointer le bout de son nez.
Eliott s’approchait du Parc ; c’était un endroit vaste, vert et propice aux sports en tous genre, si l’on écarte le Quidditch évidemment. Un calme olympien régnait, seuls un ou deux oiseaux osaient chantonner, ce qui offrait à la scène un caractère utopique. Mais cela ne durerait pas longtemps, puisqu’Eliott arriva à quai, se prenant une drôle de réflexion de la part de son ami, sourire aux lèvres. S’en suivit un match des plus coriaces, sans magie, où seul le physique et la stratégie étaient présents. Un bon moyen de démarrer la journée, alors que l’aube pointait tout juste le bout de son nez. C’était d’ailleurs le seul moment où il leur était possible de faire ça, étant donné leur boulot de professeur à l’école. La partie avait été de courte durée, car un vacarme se fit entendre. Sûrement le fruit d’une tentative foireuse d’un élève de première année. Eliott et Jaeden se précipitèrent dans l’enceinte du château afin de capturer les auteurs de ce brouhaha. Dans la précipitation, Eliott oublia sa veste dans le parc. Poursuivant ses cours toute la journée, il ne put s’y rendre qu’au coucher du soleil, espérant qu’elle n’ait pas été « emprunté frauduleusement » dirons-nous.
Cherchant dans la pénombre, les yeux plissés, il devait avoir sacrément l’air idiot.
Et bien sûr, il fallait que quelqu’un passe par là : la belle Skye-Lee, élève de sixième année à l’école. Avec cette jeune femme, Eliott n’avait échangé que quelques mots récemment, mais une incroyable alchimie s’était formée. Ils étaient restés plongés dans le regard de l’autre pendant des secondes qui parurent stopper le temps, selon Eliott. Il la trouvait fascinante, incroyablement attirante tant physiquement que moralement. C’était une femme sublime. Et elle lui redonnait envie de vivre une histoire à deux, de la découvrir. Depuis plusieurs jours, il s’interdisait de penser à elle, en vain. Skye hantait ses pensées, et elle était là, avec lui, dans la pénombre du parc. Premier objectif : garder son sang froid.

« Skye-Lee ! Oui c’est un peu ça. Et je ne suis pas le seul apparemment.. » Il avait tout bonnement envie de lui dire de jouer avec lui au somnanbule, mais non, garder son sang froid, garder-son-sang-froid, se répétait-il. « Que fais-tu ici ? » Innocemment, il venait de la tutoyer, brisant la première barrière qui les séparer, espérant qu’elle se permette de suivre l’idée.